Interview

DÉLUGE (2020) - Francois-Thibaut Hordé (Guitare)

Avec « Ægo Templo » Déluge a sorti un très grand album. Un disque tout en émotions qui transcende le post-black. Un album majeur qui fera date. Entretien avec François-Thibaut Hordé, guitariste et compositeur du groupe.

«Le premier album, « Æther » date de 2015. Pourquoi aura-t-il fallu attendre cinq années pour lui voir un successeur ? »


« J'avais besoin avec « Æher » de dire quelque chose de fort. J'aurais trouvé malhonnête de recomposer de suite après. On a tourné deux, trois ans avec cet album et puis il y a eu deux ans de boulot pour « Ægo Templo ».

« Tu as dit dans une interview que tu te retrouvais dans le black sans en faire partie. »

« Je suis passé, au cours de ma vie, par toutes les phases musicales. Je suis sensible aux choses bien faites tant dans le jazz que dans le black. Mon éveil musical au black est passé par Deafheaven. J'y ai trouvé une énergie primitive qui m'a beaucoup plu. J'ai découvert ensuite d'autres choses dans le black. Nous n'avons, pour notre part, jamais été un groupe black. »

« Comment qualifierais-tu ton groupe : post-metal, post hard-core, post-rock ? »

« Tu as répondu à la question. On cherche encore une étiquette. J'aimerais bien en trouver une qui soit belle. »

« L'album respire encore davantage que les disques de post-metal et de post hard-core. Comment as-tu pensé ses respirations ? »

« Je me garde toujours la tracklist pour la fin. On a voulu mettre du relief dans ce disque. Ce travail de respiration arrive de lui même dans les pistes. »

« Les paroles sont assez sombres mais c'est un album plein d'espoir. »

« Cela me touche que tu dises cela. Tu es le premier à me le dire. Le disque est mélancolique et ce sentiment peut exprimer beaucoup de choses : la joie, la tristesse, les souvenirs... L'espoir ressort de cet album. »

« On entend plein d éléments naturels dans le disque, le vent, l'eau. Comment se greffent-ils à la musique ? »

« Il y a un rapprochement naturel entre la mélancolie et l'eau. Il y a bien sûr une part d'esthétisme dans tout cela. On était branché pluie autrefois. Aujourd'hui, nous sommes davantage branchés vagues mais cela reste de l'eau. »

« Les titres peuvent être à la fois courts ou longs. »

« Lorsque je fais le tour d'une piste je ne vais pas en rajouter pour en rajouter. On a fait plus d'efforts que sur le premier album sur les formats courts. »

« Comment as-tu rencontré Tetsuya Fukagawa de Envy qui apparaît sur « Gloire au silence » ?

« Je l'ai rencontré lors d'un Hellfest. Nous nous sommes parlés cinq minutes. Lorsque nous avons crée le morceau je me suis dit on dirait du screamo. Je voulais un truc poetique derrière et j'ai pensé à lui. Je lui ai envoyé la piste. Cela a failli ne pas se faire car au Japon ils étaient confinés de façon hard. »

« Il y a ce côté screamo comme chez Envy sur plusieurs morceaux de l'album. Tu en écoutes ? »

« Oui j'en ai écouté comme j'ai écouté du post-hard core. Je suis très sensible à cela. Je me sens plus proche de ces genres que du metal. J'aime le côté transcendental de Messhughah dans le metal. Selon moi, pour faire du metal, il faut être extrême sinon cela n'a guère d'intérêt. »

« Vous chantez en français depuis vos débuts. Pourquoi ce parti-pris ? »

« Tout est métaphorique dans Déluge et l'on ne pourrait pas l'exprimer dans une langue autre que le français. Il y a une richesse particulière dans cette langue. Cela ne changera pas dans le futur. Les sujets que l'on aborde sont tellement personnels qu'on ne peut pas les chanter dans une autre langue que la nôtre. »

« Le disque est très émotionnel. »

« Il faut qu'il se passe quelque chose. Dans le metal il y a trop de choses où il ne se passe rien. C'est bien orchestré mais ça ne me fait pas vibrer. »

« Cet album sort chez Metal Blade. Vous êtes assez expérimentaux pour un label de ce style. »

« C'est vrai que c'est très metal. Ils ont Cannibal Corpse, Behemoth. Ils ont également des groupes comme Cult of Luna ou The Ocean. J'ai pensé à signer chez un label génraliste mais je suis très content de Metal Blade. »

« Cela vous aide pour le développement à l'étranger, j'imagine. »

« Nous étions sur Les Acteurs de l'Ombre pour le premier. C'est un super label mais pour un premier ou deuxième album. Ils ont une super image. Il y a des gens qui achètent toutes leurs sorties. Il y a un dénominateur commun entre les groupes du label. Metal Blade a bien sûr davantage de moyens. C'est une usine. »

« Il y a peu de groupes français chez eux. Comment vous-ont ils signés ? »

« C'est eux qui nous ont branchés, à l'Eurosonic. »

« Il y avait une tournée prévue. C'est mort ? »

« On a fait toutes les concessions possibles pour que la tournée ait lieue en décembre mais c'est quasiment mort, oui. »
 
Critique : Pierre Arnaud
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