Interview

DEMANDE À LA POUSSIÈRE (2021) - Groupe au complet

Entre sludge, doom, post-rock et black Demande à la Poussière développe un univers extrêmement riche et original. Le second album du groupe « Quiétude Hostile » est une grande réussite. Rencontre avec ce groupe aussi intriguant que fascinant.

« Le nouvel album est encore plus sombre que ne l’était le précédent. Une envie de ténèbres ? »

« Cela reflète l’ambiance du moment. Nous avons commencé à composer fin 2019. La pandémie arrivant à accentuer ce côté-là. C’est vrai que la couleur du disque est très sombre, plus sombre encore que celle du premier. Nous voulions être dans la continuité de celui-ci. »

« La pochette de l’album évoque d’ailleurs ces ténèbres, je trouve. »

« Elle invite à la réflexion. Mais plus qu’aux ténèbres elle évoque la folie. Lorsqu’Aurélie nous l’a envoyé, nous l’avons trouvé parfaite. On voulait une pochette à l’image de celles des albums de Emperor/Darthrone. Aurélie a bien capté cela. Il n’y a pas d’approche moderne dans ce disque. Tout est analogique : de vraies batteries, de vrais amplis. Il y a une vraie authenticité et cette pochette reflète bien cela. »

« Musicalement vous évoluez entre sludge, doom, post-hard/core. Ce sont vos influences principales ? »

« Oui avec également quelques incursions dans le black. Le premier album était très doom. Sur celui-ci l’influence black est plus forte notamment dans la façon de chanter. »

« Je perçois également une influence post-rock. »

« Cela nous fait plaisir que tu la perçoives car elle y ait effectivement. Nous écoutons du post-rock. C’est un nouvel apport musical par rapport au premier album. Un apport mélodique. La mélancolie que tu trouves dans le disque vient du post-rock. »

« Et vous-mêmes comment vous qualifieriez-vous ? »

« Notre terreau de base c’est le sludge. Il faut que dans notre musique on entende les saturations. Il faut que ça grésille. Le sludge mais le doom aussi. Nous voulons un son organique. Nous sommes plus proches dans les sonorités de Eye Hate God que de Gojira. On veut que ça sente le sang et la sueur. Notre premier album était un disque de studio. Nous aimons la scène et voulions une approche live pour celui-ci. »

« Le climat général du disque est noir et oppressant. »

« C’est le meilleur compliment que l’on puisse nous faire. Notre son est ainsi : oppressant. »

« Pourquoi ce choix de chanter en français ? »

« Déjà nous venons de pas mal de groupes où l’on chantait en français. Ensuite c’est une langue très riche. On peut exprimer beaucoup de choses en utilisant la langue française. Et nous aimons son imagerie littéraire. »

« On entend la voix d’un écrivain sur « L’oubli du contrasté ». Qui est-ce ? »

« Françoise Sagan. Elle y parle d’une jeunesse désarmée, sans but. Nous avons construit une atmosphère musicale autour de ses mots Ils sonnent juste et en adéquation parfaite avec la jeunesse d’aujourd’hui. »

« Le titre de l’album « Quiétude Hostile » joue sur un paradoxe. »

« Totalement. Cela se retrouve dans la pochette, dans les clips. Quiétude Hostile cela fait sens. Comme un prédateur qui fonce sur sa proie. L’album alterne parties calmes et salves de violence obscure donc ça fonctionne bien. C’est comme la vie de tous les jours. Il y a la lumière au bout du tunnel. »

« Le nom du groupe est tiré d’un livre de John Fante. C’est un auteur qui vous a marqué ? »

« C’est un livre qui m’a accompagné dans ma jeunesse. On aime aussi beaucoup les livres de son fils, Dan Fante. Nous aimons ses auteurs car ils expriment bien les envies, envies qui peuvent résumer nos vies actuelles. On a peut-être une petite préférence pour Dan qui est plus sombre que ne l’était son père. »

« Avec un nom comme « Demande à la poussière » on pense forcément à « Regarde les hommes tomber ». Vous vous sentez proches d’eux ? »

« Oui même si nous ne les connaissons pas. C’est vrai qu’avec un nom comme cela, qui plus est français les gens font forcément un rapprochement. »

« Vous expérimentez à travers de nombreux styles musicaux. Il y a même un côté jazz sur « Expiravit. »

« Pas forcément jazz. Avec son intro de plus de deux minutes avec des larsens cela va davantage vers la musique abstraite que le jazz. On entend sur le morceau Dima, le saxophoniste d’un groupe ukrainien : White Ward. C’est un groupe d’avant-garde que nous aimons beaucoup. C’est vrai que lui vient du jazz. Il y a un côté cinématographique dans ce titre qui pose une ambiance. Nous sommes ouverts musicalement, ne nous interdisons rien. »

« Vous êtes sur My Kingdom Music, un label italien. Comment ça se passe avec eux ? »

« Super bien. Ce label a quinze ou dix sept ans d’existence. On connait Francesco, le boss du label depuis six, sept ans. C’est un label metal qui a vraiment de bons trucs comme Crest of Darkness. Ils bossent bien, développent bien notre projet. »

« Il est difficile de faire de la scène actuellement mais vous pensez aux concerts à venir ? »

« Clairement. Nous nous attelons à travailler le live. On a hâte de retourner sur scène. En attendant on va s’occuper de défendre cet album, d’en faire la promo. On réfléchit aussi à l’avenir, à ce qui se passera une fois la pandémie passée, à la possibilité de faire des concerts dans des squatts, par exemple. »
 
Critique : Pierre Arnaud
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