Interview
CRESCENT (2019) - Ismaeel Attallah (Chant/Guitare Rythmique)
Crescent est devenu, et ce n’est que justice, le groupe de metal égyptien le plus connu à travers le Monde. Sorti il y a bientôt deux ans « The Order Of Amenti » était un superbe disque de death à l’atmosphère froide et sombre. Le groupe ne devrait pas tarder à sortir un nouvel album. Rencontre au Café Riche du Caire avec leur très sympathique guitariste/chanteur Ismaeel Attallah.
« Tu imaginais à vos débuts il y a vingt ans que vous seriez encore là aujourd’hui ? »
« Non pas du tout. Teenager, j’ai découvert le metal au Caire grâce à des groupes de reprises de mecs qui avaient une dizaine d’années de plus que moi. Cela m’a plu. Je suis tombé amoureux de la distorsion. J’ai eu envie de créer un groupe mais je n’aurais jamais imaginé qu’un jour nous aurions une réputation internationale. »
« Vous n’avez sorti qu’une demo, un EP et deux albums en vingt ans. Pourquoi produisez-vous si peu ? »
« La première démo date de 1999. On a fait un EP en 2009. A nos débuts, nous étions inspirés par le death-metal suédois. J’ai eu besoin de construire mon identité pour me démarquer de ses influences. Les musiciens avec lesquels je jouais souhaitaient continuer dans ce style, mais pas moi. Je continue d’aimer le death suédois mais il y a des groupes qui font cela très bien et j’estimais que je devais trouver ma propre voie. Je ne voulais pas être un nenieme groupe du genre. »
« Dans vos deux albums, il y a de nombreuses références à la mythologie égyptienne. »
« Je suis fasciné par celle-ci. Musicalement, je voulais quelque chose d’épique. Epique comme pouvait l’être la mythologie égyptienne. Je m’intéresse à fond à celle-ci, notamment au concept de la résurrection. C’est une philosophie très riche. L’architecture de cette époque impressionne aujourd’hui encore et c’est normal. L’histoire d’Osiris est superbe. Après son assassinat dans un complot organisé par son frère cadet Seth, il retrouve la vie par la puissance magique de ses sœurs Isis et Nephtys. C’est magnifique. Fascinant. Cela te touche profondément. C’est pourquoi « In The Name Of Osiris », l’un des morceaux du disque lui est dédié. »
« Que représente la pochette du disque ? »
« Elle représente Anubis qui croit à la vie éternelle. Tu vois sur cette pochette, le cœur d’une personne posé sur une balance. Si ton cœur est trop lourd, tu pars en enfer. Si le cœur est léger, tu vas au Paradis. Anubis accueille les morts auprès de lui. Il momifie les corps afin de les rendre éternels, comme il purifie les cœurs. » »
« Et le titre de l’album ? « The Order of Amenti » ?
« Amenti » est un mot qui désigne ce lieu souterrain où se rendent les âmes après la mort. »
« Il y a dans le disque l’apport d’instruments traditionnels égyptiens. C’est important pour toi de les utiliser ? »
« Oui, c’est important. Les trois derniers morceaux du disque racontent une Histoire autour de la résurrection. Notre son peut parfois avoir un côté traditionnel égyptien, effectivement. Il y a ce côté épique de notre culture, de notre civilisation qui a été si important dans l’Histoire. C’était tellement sophistiqué pour l’époque. Cela brise mon cœur que l’Egypte ne possède pas actuellement le statut qu’elle devrait avoir. Mon pays m’inspire énormément. J’essaie de faire un parallèle entre l’Histoire de l’Egypte Antique et l’Egypte d’aujourd’hui. »
« Malgré l’utilisation de ces instruments, j’imagine que tu ne te reconnais pas dans l’oriental metal ? »
« Effectivement. Avec tout le respect que je peux avoir pour ces groupes, je déteste le metal-oriental. C’est un genre qui est fait pour danser et qui est beaucoup trop mainstream. Lorsque nous utilisons le tabla, ce n’est pas pour faire oriental, c’est parce qu’il s’impose dans ce morceau là, à ce moment là. C’est un ami qui en joue sur le disque. Il y en aura encore sans doute davantage dans le prochain album. »
« Tu écoutes de la musique traditionnelle égyptienne ? »
« Il y a en ce moment une vague musicale qui mêle folklore égyptien et hip/hop. Les chauffeurs de taxi en sont fans. C’est horrible. Oum Kalsoum est toujours présente dans le cœur des Egyptiens. Je la respecte mais je n’écoute pas ce genre de musique. J’aime les choses plus complexes. »
« Vos morceaux sont très longs. »
« Je vois un morceau comme un tableau. Cela m’importe peu que le morceau dure deux minutes ou huit minutes. L’important pour moi est d’arriver à ma propre satisfaction en tant que musicien. Si tu arrives à cela, tu satisferas aussi le public. »
« Pour toi, le point culminant de la carrière du groupe, pour le moment, est le jour où vous avez joué à Wacken ? »
« Probablement. C’est presque trop gros ce Festival. C’est Disney. C’est long d’aller d’un point à un autre et tu t’uses les pieds. C’était la première fois qu’un groupe égyptien s’y produisait. Cela nous a ouvert des portes pour d’autres festivals et permis d’être connu à un niveau international. En Egypte, le public metal est jeune donc pas aussi supporter des groupes que ne l’est le public européen. »
« Comment avez-vous signé avec ce label français Listenable. »
« Nous avons contacté plusieurs labels à travers le monde. Tout l’album était fini, de la musique au art-work. On a eu de très bons retours et au final avons choisi Listenable. Ils sont sympas, nous respectent. C’est un travail de vraie collaboration entre eux et nous. Nous avions enregistré l’album en France avant cette signature. On devait le faire en Suède mais nous avons eu moins d’argent que prévu du fait de la crise économique qui est arrivée à ce moment là en Egypte. Du coup, nous nous sommes rabattus sur la France. »
« Il y a une scène metal en Egypte ? »
« Il y a des groupes mais c’est difficile de parler pour autant de scène. Il n’y a pas de webzine, pas de magazines. J’aime nos fans Egyptiens mais tu ne peux pas donner autant de concerts ici qu’en France ou Allemagne. Il y a, malgré tout un vrai potentiel musical dans notre pays. »
« Vous grandissez au niveau international ? »
« Là où nous marchons le mieux, c’est aux Etats-Unis et en Allemagne suivi par la France. Pour venir jouer en Allemagne et en France, ce n’est pas difficile, il suffit de traverser la Méditerranée. Nous n’avons pas encore joué au Liban ou en Turquie mais cela arrivera sans doute bientôt. Nous avons joué en Espagne. Cela a été un super moment. »
« Tu vas produire plus vite que par le passé désormais ? »
« Oui. Je ne peux pas trop en parler pour le moment mais nous avons de nouveaux morceaux. Je suis très excité par ceux-ci. On continuera dans le même style, bien sûr, mas il y aura aussi des innovations. »
« Tu écoutes quoi en ce moment ? »
« Pas mal de metal islandais. J’écoute plein de choses, pas seulement du metal, également de la pop. J’aime même Kylie Minogue. »
« Tu imaginais à vos débuts il y a vingt ans que vous seriez encore là aujourd’hui ? »
« Non pas du tout. Teenager, j’ai découvert le metal au Caire grâce à des groupes de reprises de mecs qui avaient une dizaine d’années de plus que moi. Cela m’a plu. Je suis tombé amoureux de la distorsion. J’ai eu envie de créer un groupe mais je n’aurais jamais imaginé qu’un jour nous aurions une réputation internationale. »
« Vous n’avez sorti qu’une demo, un EP et deux albums en vingt ans. Pourquoi produisez-vous si peu ? »
« La première démo date de 1999. On a fait un EP en 2009. A nos débuts, nous étions inspirés par le death-metal suédois. J’ai eu besoin de construire mon identité pour me démarquer de ses influences. Les musiciens avec lesquels je jouais souhaitaient continuer dans ce style, mais pas moi. Je continue d’aimer le death suédois mais il y a des groupes qui font cela très bien et j’estimais que je devais trouver ma propre voie. Je ne voulais pas être un nenieme groupe du genre. »
« Dans vos deux albums, il y a de nombreuses références à la mythologie égyptienne. »
« Je suis fasciné par celle-ci. Musicalement, je voulais quelque chose d’épique. Epique comme pouvait l’être la mythologie égyptienne. Je m’intéresse à fond à celle-ci, notamment au concept de la résurrection. C’est une philosophie très riche. L’architecture de cette époque impressionne aujourd’hui encore et c’est normal. L’histoire d’Osiris est superbe. Après son assassinat dans un complot organisé par son frère cadet Seth, il retrouve la vie par la puissance magique de ses sœurs Isis et Nephtys. C’est magnifique. Fascinant. Cela te touche profondément. C’est pourquoi « In The Name Of Osiris », l’un des morceaux du disque lui est dédié. »
« Que représente la pochette du disque ? »
« Elle représente Anubis qui croit à la vie éternelle. Tu vois sur cette pochette, le cœur d’une personne posé sur une balance. Si ton cœur est trop lourd, tu pars en enfer. Si le cœur est léger, tu vas au Paradis. Anubis accueille les morts auprès de lui. Il momifie les corps afin de les rendre éternels, comme il purifie les cœurs. » »
« Et le titre de l’album ? « The Order of Amenti » ?
« Amenti » est un mot qui désigne ce lieu souterrain où se rendent les âmes après la mort. »
« Il y a dans le disque l’apport d’instruments traditionnels égyptiens. C’est important pour toi de les utiliser ? »
« Oui, c’est important. Les trois derniers morceaux du disque racontent une Histoire autour de la résurrection. Notre son peut parfois avoir un côté traditionnel égyptien, effectivement. Il y a ce côté épique de notre culture, de notre civilisation qui a été si important dans l’Histoire. C’était tellement sophistiqué pour l’époque. Cela brise mon cœur que l’Egypte ne possède pas actuellement le statut qu’elle devrait avoir. Mon pays m’inspire énormément. J’essaie de faire un parallèle entre l’Histoire de l’Egypte Antique et l’Egypte d’aujourd’hui. »
« Malgré l’utilisation de ces instruments, j’imagine que tu ne te reconnais pas dans l’oriental metal ? »
« Effectivement. Avec tout le respect que je peux avoir pour ces groupes, je déteste le metal-oriental. C’est un genre qui est fait pour danser et qui est beaucoup trop mainstream. Lorsque nous utilisons le tabla, ce n’est pas pour faire oriental, c’est parce qu’il s’impose dans ce morceau là, à ce moment là. C’est un ami qui en joue sur le disque. Il y en aura encore sans doute davantage dans le prochain album. »
« Tu écoutes de la musique traditionnelle égyptienne ? »
« Il y a en ce moment une vague musicale qui mêle folklore égyptien et hip/hop. Les chauffeurs de taxi en sont fans. C’est horrible. Oum Kalsoum est toujours présente dans le cœur des Egyptiens. Je la respecte mais je n’écoute pas ce genre de musique. J’aime les choses plus complexes. »
« Vos morceaux sont très longs. »
« Je vois un morceau comme un tableau. Cela m’importe peu que le morceau dure deux minutes ou huit minutes. L’important pour moi est d’arriver à ma propre satisfaction en tant que musicien. Si tu arrives à cela, tu satisferas aussi le public. »
« Pour toi, le point culminant de la carrière du groupe, pour le moment, est le jour où vous avez joué à Wacken ? »
« Probablement. C’est presque trop gros ce Festival. C’est Disney. C’est long d’aller d’un point à un autre et tu t’uses les pieds. C’était la première fois qu’un groupe égyptien s’y produisait. Cela nous a ouvert des portes pour d’autres festivals et permis d’être connu à un niveau international. En Egypte, le public metal est jeune donc pas aussi supporter des groupes que ne l’est le public européen. »
« Comment avez-vous signé avec ce label français Listenable. »
« Nous avons contacté plusieurs labels à travers le monde. Tout l’album était fini, de la musique au art-work. On a eu de très bons retours et au final avons choisi Listenable. Ils sont sympas, nous respectent. C’est un travail de vraie collaboration entre eux et nous. Nous avions enregistré l’album en France avant cette signature. On devait le faire en Suède mais nous avons eu moins d’argent que prévu du fait de la crise économique qui est arrivée à ce moment là en Egypte. Du coup, nous nous sommes rabattus sur la France. »
« Il y a une scène metal en Egypte ? »
« Il y a des groupes mais c’est difficile de parler pour autant de scène. Il n’y a pas de webzine, pas de magazines. J’aime nos fans Egyptiens mais tu ne peux pas donner autant de concerts ici qu’en France ou Allemagne. Il y a, malgré tout un vrai potentiel musical dans notre pays. »
« Vous grandissez au niveau international ? »
« Là où nous marchons le mieux, c’est aux Etats-Unis et en Allemagne suivi par la France. Pour venir jouer en Allemagne et en France, ce n’est pas difficile, il suffit de traverser la Méditerranée. Nous n’avons pas encore joué au Liban ou en Turquie mais cela arrivera sans doute bientôt. Nous avons joué en Espagne. Cela a été un super moment. »
« Tu vas produire plus vite que par le passé désormais ? »
« Oui. Je ne peux pas trop en parler pour le moment mais nous avons de nouveaux morceaux. Je suis très excité par ceux-ci. On continuera dans le même style, bien sûr, mas il y aura aussi des innovations. »
« Tu écoutes quoi en ce moment ? »
« Pas mal de metal islandais. J’écoute plein de choses, pas seulement du metal, également de la pop. J’aime même Kylie Minogue. »
Critique : Pierre Arnaud
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