Interview

SKALD (2020) - Justine et Pierrick

Moins de deux ans après le carton du « Chant des Vikings », Skáld nous revient déjà avec un deuxième album «Vikings Memories » particulièrement réussi. Nous avons eu l'occasion de nous en entretenir avec Justine et Pierrick.

« Dans quel état d'esprit étiez-vous lorsque vous avez composé « Vikings Memories » ?


« On a voulu s'ouvrir à un autre Nord, à un Nord plus grand que celui du premier album. Le théme de ce disque est beaucoup plus large que celui de la mythologie nordique. On a été cherché des choses antérieures à l'époque viking. Les valeurs dont on parle sont universelles. On a trouvé avec ce disque nos couleurs, nos personnalités. Nos textes parlent de changements climatiques et sociaux. Ce sont des thémes qui étaient déjà présents à l'époque viking. On a mélangé dans cet album ce qui relève de l' ancestral et ce qui relève du contemporain. »

« Comment vous est venu le goût pour la culture viking ? »

« C'est difficile à expliquer. Tu te sens en vibration avec une époque sans savoir pourquoi. Je ne me sens pas adapté à ce monde moderne, aux nouvelles technologies par exemple. On ressent l'appel du Nord. On aime les musiques anciennes sutout celles de Norvège, de Suède. C'est comme un trésor mystérieux. Il y a encore dix ans personne ne parlait de cela. »

« On associe souvent ces cultures au paganisme. Celui-ci vous intéresse aussi j'imagine ? »

« Bien sûr. Le paganisme peut avoir une connocation religieuse mais pas seulement. La spiritualité de ces peuples était liée au rythme des saisons, des récoltes. Le monde moderne a oublié ce rythme naturel. Nous sommes déconnectés de tout cela. Nous le sommes à nos ordis mais plus à la terre. Le mot paganisme vient du latin pagana: il est né paysan. Le message qu'on essaie de faire passer est : « déconnectez vous du virtuel pour vous reconnecter à l'ancestral ». »

« La Nature est omniprésente dans l'album. Y-a-t-il sur celui-ci des samples d'éléments naturels ? »

« On travaille avec Christophe Voisin-Boisvinet qui possède une banque de sons hallucinantes : vent, eau, tempêtes...Tu trouves tous ces sons dans l'album, comme d'autres également, des bruits d'animaux par exemple. »

« Vous utilisez le vieux norrois. Comment avez-vous appris cette langue ? »

« On ne le parle pas couramment. Cet élément pourrait apparaître comme quelque chose qui complique notre travail mais ce n'est pas le cas. Regarder des films en norvégien ou en suèdois nous aide. Ce sont des mots agrèables à travailler quand on chante. »

« Il y a peu de groupes qui chantent dans cette langue, non ? »

« Il y en a quelques uns. Dans le premier album, on avait beaucoup utilisé les vieux textes mythologiques..Là on a travaillé avec des linguistes pour faire nous mêmes nos textes. On trouve donc dans le disque de vieux textes mais aussi d'autres que nous avons écrits. Les vieux textes sont souvent très longs. On peut les interprèter de différentes manières. On ne fait jamais rien au hasard. On espère que les gens feront ce travail d'écoute pour les comprendre. Sur le site du groupe, tu peux d'ailleurs trouver la traduction des textes. »

« Le premier album avait été un très grand succès. Cela vous avait étonnés ? »

« Totalement. Cela nous a sauté à la figure à l'époque. Il y a des séries comme « Vikings » ou « Game Of Throne » qui ont cartonné et ont permis d'intéresser plein de gens à ces périodes de l'Histoire. Avant cela, « Le Seigneur des Anneaux » avait déjà ouvert des portes. On a signé avec Decca qui fait partie du groupe Universal ce qui permettait de faire les choses en grand. Mais un aussi grand succès nous a étonné. C'est bon signe. On est pas obligé de faire du commercial pour plaire. »

« Les instruments sur lesquels vous jouez, talharpa, nyckelharpa n'existent plus aujourd'hui ? »

« Si, il y a un luthier dans les Vosges qui en fabrique. J'ai enregistré plusieurs album dans le comté d' Uppsala qui est la mecque de la musique traditionnelle scandinave. Ils ont là-bas une vielle sur laquelle tu trouves une reverb. Il y a des luthiers qui fabriquent des talharpa. On a crée la skaldarpa spécialement pour le groupe. J'avais besoin d'un jeu et d'un son que je n'arrivais pas à assouvir avec les instruments traditionnels. Cet instrument permet d'apporter un vocabulaire musical approprié à nos chansons. »

« Où avez-vous enregistré l'album ? »

« En Bretagne. A la sortie du confinement. Cela nous a permis de nous ressourcer. L'album est axé sur la mer, l'évasion donc c'était l'endroit idéal. C'est un lieu où tu trouves une pyramide engloutie. Cela correspond à nos thématiques. On a vécu un moment magique. »

« Le titre incite à la mémoire. »

« Exactement. On a tendance à ne regarder que vers l'avenir. Il est important de regarder le passé aussi. Nous ne sommes pas plus heureux aujourd'hui que nous ne l'étions autrefois. Le devoir de mémoire oblige à être humble vis à vis de la Nature. Le monde ne disparaitra pas mais l'humain, lui, peut disparaître. Autrefois, les gens vivaient de façon nomade. On peut s'inspirer de cela. »

« Musicalement on vous classifie souvent folk. Comment vous, vous qualifiriez-vous ? »

« La structure de nos morceaux est très chanson et c'est notre souhait. Dans folk tu peux mettre plein de choses : ça va de la musique médiévale du Moyen Age à Malicorne et Bob Dylan. On peut dire aujourd'hui qu'on fait du Skáld. Cela plaira aux gens qui aiment la musique médiévale comme à ceux qui apprécient le néo-folk. »

« Vous n'êtes pas metal mais jouez dans les festivals metal. »

« Dans tous les festivals metal, il y a une scène dédiée à ce genre musical, désormais. L'esthétique guerrière, d'aventuriers que nous avons plait à ce public. Et le côté pagan aussi, bien sûr. »
 
Critique : Pierre Arnaud
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