Chronique

MARILLION - MARBLES IN THE DARK / Ear Music 2017

Marillion sort donc en 2017 le live anniversaire de la tournée des dix ans de « Marbles », le très bien nommé « Marbles in the Park ». Ce n’est pas le premier groupe à faire une tournée en jouant un album entier, dans l’ordre et comme sur le disque mais en live, et ce n’est pas le dernier. Par contre avant de parler de cet album j’adorerais profiter de ton temps de cerveau disponible, ami lecteur, pour clarifier des points qu’il me semble important à soulever grâce à cet album.

Problème numéro 1 : Marillion est-il un groupe de métal ? Non parce que on rigole on déconne mais si tu as atterri ici c’est quand même parce que tu aimes comme moi une certaine musique. Bon pas que ça évidemment, on peut adorer Napalm Death et écouter Pink (si, c’est possible, ça s’appelle avoir des enfants). Alors j’ai envie de dire NON, Marillion n’est pas et n’a jamais été un groupe de métal. J’adore le groupe, c’est beau, c’est fin, c’est intelligent. Quand on réussit à écouter un album en entier avec Steve Hogarth au chant sans piquer du nez ça peut même apporter un sentiment de victoire sur la vie assez imposant. Dire que Marillion est un groupe ne serait-ce qu’affilié de loin au métal reviendrait à dire que Dire Straits a inventé le rockab’ et Genesis le métal symphonique. A l’époque où Fish était encore au chant, on a parfois évoqué une hargne rentrée et des guitares jouées avec la vigueur nécessaire, mais c’était à une époque où le simple fait de jouer de la guitare vous rangeait directement dans la catégorie « musiques extrêmes », merci à Duran Duran d’avoir donc été les précurseurs de l’électro indus à ce moment-là…

En plus soyons clair, si nerf il y avait quand Fish tenait le micro (il y a 4 millions d’années et pour seulement 4 albums, va falloir apprendre à s’en remettre quand même, on a tous eu des ex qui ont duré plus longtemps), depuis que Steve Hogarth a repris la voix et une bonne partie des commandes psychomotrices, le groupe est carrément devenu vegan. J’adore le savoureux nectar d’un jus de salsifis revenu dans de la mandarine fraîche avec une pointe de persil, mais on ne me fera jamais passer ça pour du Chili !

Bref vous l’aurez compris, Marillion est un groupe de prog ambient magnifique et délicat, mais ce n’est pas du métal. Donc que font-ils ici ? Mystère. Ceci devrait donc signer la fin d’un papier à rallonge, mais non, pas de bol, vous allez encore devoir me supporter (personne vous force mais je vous sens vous demander où je peux aller après une démonstration aussi fulgurante sur la non nervosité d’une musique qui a servi de berceuse à des générations de métaleux ayant cru par erreur acheter un disque de métal prog).

Je me permets de saisir l’occase que me présente l’ambitieux projet du groupe pour sonner une autre alarme sur le problème numéro 2 : L’album en entier joué en concert pour les 10/20/30/40 ans c’est chiant !

Quand the Who rejoue Quadrophenia avec deux musiciens morts et de l’arthrite c’est déjà compliqué mais alors, quand un groupe certes magnifique fête l’anniversaire d’un album

double qu’ils n’ont pas si bien vendu que ça, avouons-le par rapport à ce qu’il aurait mérité, là ça devient pénible ! Si on commence à célébrer tout ce qu’on a fait juste parce qu’on l’a fait on va bientôt se retrouver avec la fête du service compta pour les 10 ans de la nouvelle machine à café (bah, oui elle marche plus mais on l’aimait bien). Frank Zappa expliquait à qui voulait l’entendre que certains albums (plus de 70 de son vivant) n’étaient destinés qu’aux fans hardcore. Certes quand on a tendance à faire un album tous les 6 mois j’admets, que ça n’intéresse potentiellement que les fans hardcore (et leur banquier). Mais là, à part tenter de renflouer les caisses d’un groupe qui certes mériterait d’avoir plus de succès et une villa aux Caraïbes pour enregistrer à dispo en permanence…Ca sert à quoi ? (Relire le passage sur l’anniv’ de la machine à café, la réponse est dedans).

Marillion est un groupe qui survit grâce à la fidélité de ses fans (toi qui es fan, tu me détestes en me lisant, sache que moi aussi je suis fan de ce groupe, mais un fan éclairé qui en a marre de les voir naviguer à vouloir séduire tout le monde sans vexer les fans et finalement en arriver à être une magnifique bande de moribonds artistiques).

Et l’album donc ? Quel album ? Vous voulez dire « Marbles » ? Il est sorti en 2004 et c’était le 13ème album studio. Si vous l’avez écouté à l’époque vous savez déjà que l’écouter en live ne vous apportera que la certitude de filer des sous à un groupe qui les mérite. Musicalement, il n’y a rien de plus à apprendre, c’est beau c’est bien joué, c’est comme sur la première version mais en live. Si vous n’avez pas écouté Marbles depuis 2004… Vous croyez vraiment que vous allez bouffer le gâteau d’anniv’ d’un type que vous ne connaissez pas ? Pour découvrir Marillion, chopez plutôt « Script for a Jester’s Tear », « Season’s End » et « Brave » déjà, et on en reparle après. Si vous êtes un fan hardcore, de toute façon vous achèterez « Marbles In The Park »… Bon sang, si ça se trouve vous l’écoutez en me lisant ! Le rappel vaut le coup : deux titres d’Afraid Of Sunlight (« King » et « Out Of This World »), et un de « Sounds That Can’t Be Made » (« Sounds That Can’ Be Made »). Niveau de prise de risque de tout ça ? Egal ou inférieur au niveau d’énervement d’« Ocean Cloud » un jour de déprime…
 
Critique : Thomas Enault
Note : 5/10
Site du groupe :
Vues : 5425 fois