Chronique
CLUTCH - BOOK OF BAD DECISIONS / Weathermaker Music 2018
25 ans au compteur, treizième album, Clutch est de retour avec « Book of Bad Decisions ». Je plaide coupable direct : je suis fan. C’est pire en fait. Au bout de treize albums qu’attendre encore d’un groupe qui t’a grosso modo toujours donné un peu mieux que ce que tu attendais, au fur et à mesure et au bon moment ? En fait, chaque sortie d’album a plus de chance de bousiller le truc que de le satisfaire. C’est le souci avec les fans. Le fan est exigeant, capricieux, ingrat, cherche à être surpris mais veut retrouver la même recette. Le fan est par essence la pire chose qui puisse arriver à la créativité d’un artiste. Le fan c’est de la merde. Une fois qu’on a donc évacué le problème d’être fan en le relativisant (oui un peu extrême comme façon de relativiser, mais avouez, vous aussi vous êtes fan de certains trucs et vous savez que c’est injuste parfois d’être exigeant à ce point avec des mecs que tu connais pas et qui ont juste eu le malheur de taper pile à l’endroit où ça résonne à l’intérieur et au bon moment), on va pouvoir causer musique à peu près calmement et objectivement.
Déjà, arrêtons-nous trois minutes sur la pochette : l’objet est joli. Ils ont déjà fait plus évolué certes, mais l’aigle chauve avec le titre relèvent de ce qu’on appelle un euphémisme : le rêve américain est bien mort et c’est peut-être là qu’il faut voir la clef de ce qui m’a surpris dès la première écoute, c’est encore plus blues que d’habitude. A l’intérieur de la pochette, on retrouve ce truc à base de collage et de photos retro bien chiadées qui fait qu’on se sent… bah chez Clutch quoi. Résultat à la première écoute et en prenant le disque, j’ai eu la mauvaise réaction. Ok rien de neuf. Et oui, le fan est injuste ! A la première écoute je me suis juste dit « rien de neuf » et vraiment rien d’autre. C’était bien, no souci. Groove de malade sur gros son : check. Voix rauque hypnotique à la fois chaude et désincarnée : check. Riffs qui décapent, old school et gras : check. Section rythmique qui bastonne lourd et reste intelligente : check again. L’album avançait et j’avais l’impression de cocher les cases d’un contrôle qualité de Sludge /Stoner /Southern Rock (les 3 en même temps) exemplaire. Et pourtant, dans ma tête y’a cette petite voix qui me disait : « Rien de neuf, c’est Clutch. Ca a toujours été très bon, les mecs prennent pas de risque. »
A la deuxième, troisième, et toutes les autres nombreuses écoutes qui ont suivi, je me suis, par contre, auto-flanqué des tartes. L’album est bon mais au fond l’erreur c’est de rentrer dedans comme si on connaissait déjà les lieux. Alors oui, peut-être que ce n’est pas l’album qui sera retenu pour avoir changé l’idée qu’on se faisait du groupe. Mais pourquoi vouloir changer une formule qui marche et qu’après tout, ils sont à peu près les seuls à pouvoir défendre sans trop se répéter. En fait, ce serait comme de reprocher à AC/DC de ne pas avoir pris de risque artistique avec « the Razors edge ».
« Book of Bad Decisions » est un album qui mérite d’être écouté comme un album de Clutch, parce que c’est un très bon album de Clutch ; pas facile à pénétrer parce qu’il se cache en lui même, derrière une écriture dont on connaît les codes. Mais c’est aussi un album qui mérite d’être écouté comme si on n’avait jamais entendu un album de Clutch, et là, ça devient un très bon album : parce qu’il s’agit de musique et que d’écoute en écoute on en redécouvre des méandres. C’est comme se balader dans une forêt qu’on croit connaître, en regardant bien, tout bouge, ça vit et il y a toujours des recoins à explorer. Et ça rend chaque traversée à la fois familièrement confortable et intellectuellement réjouissante.
Déjà, arrêtons-nous trois minutes sur la pochette : l’objet est joli. Ils ont déjà fait plus évolué certes, mais l’aigle chauve avec le titre relèvent de ce qu’on appelle un euphémisme : le rêve américain est bien mort et c’est peut-être là qu’il faut voir la clef de ce qui m’a surpris dès la première écoute, c’est encore plus blues que d’habitude. A l’intérieur de la pochette, on retrouve ce truc à base de collage et de photos retro bien chiadées qui fait qu’on se sent… bah chez Clutch quoi. Résultat à la première écoute et en prenant le disque, j’ai eu la mauvaise réaction. Ok rien de neuf. Et oui, le fan est injuste ! A la première écoute je me suis juste dit « rien de neuf » et vraiment rien d’autre. C’était bien, no souci. Groove de malade sur gros son : check. Voix rauque hypnotique à la fois chaude et désincarnée : check. Riffs qui décapent, old school et gras : check. Section rythmique qui bastonne lourd et reste intelligente : check again. L’album avançait et j’avais l’impression de cocher les cases d’un contrôle qualité de Sludge /Stoner /Southern Rock (les 3 en même temps) exemplaire. Et pourtant, dans ma tête y’a cette petite voix qui me disait : « Rien de neuf, c’est Clutch. Ca a toujours été très bon, les mecs prennent pas de risque. »
A la deuxième, troisième, et toutes les autres nombreuses écoutes qui ont suivi, je me suis, par contre, auto-flanqué des tartes. L’album est bon mais au fond l’erreur c’est de rentrer dedans comme si on connaissait déjà les lieux. Alors oui, peut-être que ce n’est pas l’album qui sera retenu pour avoir changé l’idée qu’on se faisait du groupe. Mais pourquoi vouloir changer une formule qui marche et qu’après tout, ils sont à peu près les seuls à pouvoir défendre sans trop se répéter. En fait, ce serait comme de reprocher à AC/DC de ne pas avoir pris de risque artistique avec « the Razors edge ».
« Book of Bad Decisions » est un album qui mérite d’être écouté comme un album de Clutch, parce que c’est un très bon album de Clutch ; pas facile à pénétrer parce qu’il se cache en lui même, derrière une écriture dont on connaît les codes. Mais c’est aussi un album qui mérite d’être écouté comme si on n’avait jamais entendu un album de Clutch, et là, ça devient un très bon album : parce qu’il s’agit de musique et que d’écoute en écoute on en redécouvre des méandres. C’est comme se balader dans une forêt qu’on croit connaître, en regardant bien, tout bouge, ça vit et il y a toujours des recoins à explorer. Et ça rend chaque traversée à la fois familièrement confortable et intellectuellement réjouissante.
Critique : Thomas Enault
Note : 9/10
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