Chronique

SPIRITS OF FIRE - EMBRACE THE UNKNOWN / Frontiers Music 2022

En 2018, Spirits Of Fire sentait bon le projet one shot, rassemblant la crème de la crème des seconds rôles entre deux jobs de la scène Metal qui en redemande. Mais en fait ils sont de retour et c’est cool. Alors certes, Tim Owens (l’homme qui fût Rob Halford à la place de Rob Halford) a quitté l’aventure (dommage) et en plus pour rejouer les Rob Halford à la place de Rob Halford (dans KK’s Priest ce coup-ci, si vous aimez les soap opera, le Metal anglais est fait pour vous) mais après tout si ce qu’il aime c’est être l’ombre du meilleur des chauves… ça le regarde. Pour le coup Chris Caffery, Steve Di Giorgio et Mark Zonder lui ont aussi trouvé une doublure de poids en la personne de Fabio Lione (passer de Rhapsody of Fire à Spirits of Fire, avouez que ça méritait de le faire au moins une fois dans une carrière). Alors vous allez me dire, on passe d’un chanteur très Metal et tranchant à un autre orfèvre, lui beaucoup plus délicat et lyrique donc potentiellement ça change tout. Et ben non, Fabio réussit à se placer quelque part entre Bruce Dickinson à ses débuts, le Ronnie James Dio post Sabbath et Rob Halford (le vrai ce coup-ci). Fabio Lione réussit donc le tour de force (encore un de plus à son actif) de sonner à 48 ans comme les mecs qui ont fondé la discipline du chant Metal à leurs débuts… C’est se qu’on appelle se bonifier avec le temps comme un Vosne-Romanée Conti de 78. Sans rire à l’écoute, on pourrait vous le vendre comme un album caché de Dickinson composé en 81 et re-masterisé pour sonner moderne.

Mais hormis un numéro de haute voltige vocal d’un des chanteurs les plus versatiles de la scène Metal que trouve-t-on dans cet album ? C’est un peu le hic, ce qui est une qualité s’avère après de nombreuses écoutes un petit défaut. Ce disque est intemporel, il est très bon, il est taillé comme du Hello-Maiden Savata-Priest et ça fait du bien aux esgourdes. Mais on en vient à se dire que malgré toutes les qualités du monde, on préfère les originaux. Alors oui ça vise très haut et ça passe pas loin, en ces temps où il ne se passe pas grand’chose de sympa soyons honnête, ça fait un bien fou de se dire que le Metal des années 80 à encore des choses à dire. On parlait de grand cru, ça reste un très bon millésime.

Petit bémol bis, on a toujours un Steve Di Giorgio qui reste obstinément coincé à jouer à l’octave noyé dans des monceaux de gratte certes très bien foutus mais soyons clair, n’importe qui pourrait être là ce serait pareil. On sent bien que c’est le guitariste qui dirige la barque et… c’est du gâchis. Si l’immense Chuck Schuldiner laissait Di Giorgio s’exprimer, le très anodin (comparativement) Chris Caffery serait peut-être un peu pas trop con de lui laisser de la place… Certes c’est bien foutu, mais sous-employer un des génies reconnus de son instrument pour empiler des grattes dessus, c’est à la portée du premier con venu. La frustration du sous-emploi était excusable pour le premier album, la deuxième fois c’est de la bêtise, ni plus ni moins. A ce stade je soupçonne même le gentil guitariste de lui avoir fourni la partition… (le gag…). Avouons que le mix n’aide pas, coincé dans l’infra-grave celui qui a fait partie des inventeurs du techno death est mixé comme un bassiste de Reggae et même si ça ajoute de la puissance, c’est… difficilement excusable pour les fans du monsieur (dont je fais partie. Sans déconner t’avais pas compris ?)

Le troisième Bémol c’est le seul titre de l’album qui mérite d’être jeté (tout le reste est vraiment très bon), c’est rare mais ça arrive même aux meilleurs, il s’agit de « Remember my name » (pour le coup on va essayer de l’oublier !). Alors, ici, on a droit à beaucoup de basse, beaucoup de voix et une belle batterie qui tentent de sauver la sauce, mais soyons clair, l’art de la ballade acoustique leur échappe totalement pour cause de guitare tellement pas inspirée que tous les trucs développés par les 3 autres sentent le remplissage à plein pif… C’est embarrassant de voir tout ce talent s’échiner à sauver une ballade fade et sans caractère. On va dire poliment qu’ils ont essayé de la faire à la « Mister Big » mais que ça reste small.

Alors oui, c’est un très bon album malgré des défauts que je qualifierais de politiques plus qu’esthétiques. Même si cela se traduit par une espèce d’auto-bridage d’un moteur qui a tout pour exploser. Sur le papier, il y a réellement de quoi faire avancer le genre. Au final on est dans le super classique très très bon. On se contenterait de moins sans souci donc ça passe crème, mais du coup j’attends le 3ème album avec impatience. Avec les mêmes mais plus de liberté créative pour chacun (enfin pour tous ceux qui ne sont pas guitaristes quoi).

Et blague à part, juste pour la voix c’est une tuerie. Si jamais vous cherchez un chanteur pour n’importe quelle musique capable de le faire comme les meilleurs de n’importe quel genre… La solution est en Italie et s’appelle Fabio Lione.
 
Critique : Thomas Enault
Note : 7.5/10
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