Live Report

MOTOCULTOR ACROSS EUROPE 2023 - Le Trabendo - Paris - 17/1/2023

 
Mardi 17 janvier la soirée s'annonçait pleine de surprises et de musique au Trabendo grâce à l'affiche bien dense du Motocultor Across Europe Tour, le warm up du Motocultor Festival, composé de 7 groupes (avec 5 groupes par soir), et proposant 15 dates européennes courant janvier. Je n'ai appris qu'assez tard que le groupe Omnium Gatherum ne faisait malheureusement plus partie de la tournée, et je dois avouer que ce fut une petite déception, d'autant qu'il n'y eut pas beaucoup de communication sur cette annulation et que des visuels obsolètes ont continué de circuler jusqu'au jour du concert. Heureusement la qualité des groupes présent vint assez rapidement me faire passer outre cette déconvenue.

Le premier groupe, dans les starting blocks, démarrant avec une précision suisse à l'horaire indiqué, était Ethereal Sin, un groupe japonais de black metal symphonique, à l'esthétique soignée et à la prestance très théâtralisée. Le frontman et chanteur portait un kimono aux manches amples, déployait des chorégraphies avec un éventail, le contraste entre la virulence de la musique et la grâce de la gestuelle était très intéressant. Le style musical oscillait entre black metal, ambient et metal symphonique. Le groupe se composait d'un chanteur guitariste, de deux guitaristes, d'un bassiste, d'un batteur, et tous les membres parvenaient à être à la fois solennels et plutôt facétieux avec le public. N'étant pas très spécialiste de la scène metal asiatique je dois avouer avoir découvert Ethereal Sin ce soir-là, mais avec grand plaisir.

Le deuxième groupe était également asiatique, et il s'agissait de Dark Mirror ov Tragedy (un nom qui rappelle les heures les plus sombres des pages Skyblog et des vêtements noirs à froufrous achetés au Grouft), venu de Corée du Sud. De prime abord l'esthétique du groupe m'a évoqué Cradle of Filth, puis dès que le set démarra, leur musique confirma cet a priori (plutôt de l'ordre du positif pour moi), et il semblerait que le groupe anglais soit l'une des principales inspirations de Dark Mirror ov Tragedy. Le groupe officiait dans un registre metal gothique, black metal, metal symphonique et death, avec des paroles évoquant des thèmes funestes. Les costumes des musiciens très stricts, martiaux, ornés de chaînes et de clous évoquaient vraiment Dani Filth, sans parler de la claviériste avec une petite couronne à l'instar de celle de Cradle of Filth ! Mais le show était vraiment singulier quand même malgré ces références assumées, les musiciens étaient expressifs et investis, le frontman faisait des grimaces pas possibles, et prenait parfois de belles poses pendant des moments instrumentaux planants, en se cramponnant de façon recueillie à son pied de micro lumineux. Encore une jolie découverte inattendue.

Alors que j'étais partie pour écouter du dark, du sinistre, du solennel toute la soirée, le troisième groupe Nest of Plagues est venu chambouler complètement mes attentes : en effet le groupe n'avait rien à voir stylistiquement avec les deux précédents (ni même avec les deux suivants, étant un peu l'outsider de cette soirée plutôt goth et baroque), dans la mesure où le groupe venait de Hongrie, et était le seul représentant du deathcore et du metalcore du jour ! Changement radical d'ambiance, d'esthétique, de rythmique et de thèmes, mais le groupe fut très bien accueilli par le public, dont une bonne partie ne se fit pas prier pour démarrer des pogos et circle pits, régulièrement demandés par le chanteur de Nest of Plagues. Le guitariste du groupe, certainement très investi dans le projet, avait un motif figurant le concept du groupe tatoué dans le cou, avec un visage portant le fameux masque à long bec pour se protéger de la peste. La bassiste jouait d'une basse vert fluo qui clashait bien avec ses cheveux roses flashy, et était une vraie pile électrique, sautillant partout dans ses Converse. On peut déplorer la quasi-invisibilité du batteur (mais c'était déjà vrai pour les deux groupes précédents), quasiment tout le temps dans un angle mort derrière son instrument, et peu mis en valeur par les lumières de la scène. Le chanteur et guitariste du groupe dégageait à la fois une grande jovialité et quelque chose d'écorché vif, et sa voix était particulièrement expressive pour un chant metalcore, j'ai bien apprécié ses intonations qui donnaient une vraie dynamique aux morceaux. Vers la fin pour annoncer le titre « Struggle » il a parlé du fait de se battre contre une maladie mentale (je n'ai pas entendu de laquelle il était question, en raison à la fois du brouhaha ambiant et de l'accent prononcé du chanteur lorsqu'il parlait anglais, mais d'après le contexte je suppose qu'il était question de la dépression), et de sa gratitude d'être entouré par les meilleures personnes possibles pour effectuer cette tournée. L'énergie, l'émotion et l'ouverture réunies.

Le quatrième groupe à entrer en piste était ma quatrième découverte du soir : W.E.B., venu de Grèce, qui a remis la noirceur au menu, avec de longs manteaux noirs et des maquillages sombres qui firent des guitares fluo et des cheveux roses ou verts un souvenir rapidement chassé. Le groupe dégagea très vite une énergie à la fois dark, dramatique, solennelle et une grande bonhomie : c'était très plaisant de voir un groupe de metal extrême symphonique et gothique jouer le jeu en prenant la pose, en poussant le trait, mais en même temps en faisant des grimaces au public et en ayant l'air de ne pas du tout avoir la grosse tête. Le quatuor m'a parfois fait penser à Rotting Christ, Septicflesh ou Dimmu Borgir dans le jeu de guitare, de batterie et dans le chant, et quand le chanteur revêtit un masque de monstre en latex le temps d'une chanson tout d'un coup c'est en membre de Lordi qu'il sembla s'être métamorphosé ! Le public semblait plutôt réceptif, même si le Trabendo était loin d'être plein. La fosse était relativement dense, mais tout le fond et les côtés étaient vides, mais à voir les photos finish d'autres dates européennes j'ai eu l'impression que les groupes avaient surtout joué dans des salles plus petites.

L'impatience commença à se faire sentir un peu avant 22h, c'est-à-dire avant l'entrée en scène de Fleshgod Apocalypse. La batterie centrale fut dévoilée, là au moins l'on pouvait être sûr de bien voir le batteur, contrairement à tout le reste de la soirée ! Pieds de micros ornementaux, portant des blasons « FA » et ressemblant globalement à un mélange de chandeliers et de lampadaires, piano avec de fausses bougies furent apportés sur scène, et l'on nous fit patienter au son de morceaux de musique classique de Vivaldi et Mozart. Alors que 22h était dépassé de plusieurs minutes l'on sentait la tension grandir dans le public, l'on commençait vraiment à se sentir mis en attente sur un serveur téléphonique, mais heureusement après un léger retard le groupe italien de death metal est arrivé sur scène tout sourire, sous les acclamations d'un public déjà conquis. Le charisme était forcément au rendez-vous, vu que le style du groupe est très marqué et reconnaissable, les membres masculins étant fardés, vêtus de queues-de-pie et de pantalons baroques, couverts de dentelles, de fioritures, de broderies un peu déchirées, pour une esthétique à la fois élégante et destroy. La choriste quant à elle portait une longue et ample robe en dentelle et tulle (dans les manches de laquelle je nageais à chaque fois qu'elle s'approchait du bord de la scène, c'était plutôt une expérience amusante), un diadème pointu, un maquillage bleu et tenait dans sa main une canne ornée d'un caducée. Dès le début du set le groupe fit une brillante démonstration de talent et d'aisance à la fois, et c'était un plaisir de voir à quel point la performance semblait facile pour les six membres du groupe, occupant la scène comme s'ils étaient chez eux. Le chanteur interagissait pas mal avec le public, avec des petites touches de français mignonnes du genre « Est-ce que ça va trop bien ? Est-ce que ça va souper souper trop bien ? », comment répondre non franchement ? Le groupe a beau avoir fait ses preuves depuis longtemps les musiciens donnent l'impression d'être proches de leurs fans, d'être abordables et très enjoués, véritablement ravis d'être là. Les arrangements étaient parfaits, les enchaînements fluides, le son permettait de profiter des instruments et des voix, les compos endiablées et sophistiquées sont élégamment exécutées. Je n'ai pas vu le temps passer alors que la setlist alternait des titres de différentes époques, avec une prédilection pour les albums « Veleno » (sortis en 2019) et « Agony » (datant de 2011). Le chanteur remercia le Motocultor Across Europe Tour, le Trabendo, le public d'être venu ce soir par ce froid, et nous dit qu'en France nous avions les meilleurs festivals, le Motocultor, le Hellfest, alors qu'ils n'avaient que des « OK festivals » en Italie. Après 10 titres le groupe s'éclipsa, et nous sortîmes, repus de musique pour ce soir, après une soirée excellente et très bien organisée par Access Live.

Setlist : 1) Fury 2) Hearing through War 3) Sugar 4) Monnalisa 5) The Violation 6) Epilogue 7) No 8) The Fool 9) The Egoism 10) Forsaking
 
Critique : Elise Diederich
Date : 17/1/2023
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